La Liquidation Préférentielle : Comprendre et négocier cette clause clé pour investisseurs et fondateurs

Découvrez comment la liquidation préférentielle influence l’avenir financier des startups. Cet article vous éclaire sur ses mécanismes, ses impacts concret et vous livre des conseils pratiques afin de préserver l’équilibre entre investisseurs et fondateurs.

La liquidation préférentielle : un passage obligé des levées de fonds.

Lorsqu’une startup cherche à lever des fonds, la liquidation préférentielle est presque toujours au menu. Cette clause vise à protéger les investisseurs en leur assurant qu’ils récupéreront en priorité leur mise voire davantage si la société est vendue ou liquidée. Cependant attention : mal négociée, elle peut sérieusement réduire la part des fondateurs et autres actionnaires. Ce guide fait non seulement le point sur les différents types de liquidation préférentielle mais aussi leurs effets financiers ainsi que les bonnes pratiques pour mieux les encadrer.  

Liquidation préférentielle : définition 

La liquidation préférentielle garantit aux investisseurs le remboursement de leur investissement initial (ou d’un montant supérieur) avant que les autres actionnaires, y compris les fondateurs, puissent prétendre à une part du gâteau lors d’une liquidation ou d’une vente.

Ce mécanisme trouve tout son sens dans les premiers tours de financement : les fondateurs détiennent souvent des actions émises à très faible valeur nominale, tandis que les investisseurs achètent leurs parts sur la base d’une valorisation bien plus élévée. Ce décalage justifie la mise en place de protections comme la liquidation préférentielle, particulièrement pour les fonds et les business angels. 

 

Les différents types de liquidation préférentielle 

1. Liquidation préférentielle simple (1x)

Les investisseurs récupèrent en priorité la totalité de leur investissement initial. Exemple : une entreprise est vendue pour 3 millions d’euros ; si les investisseurs ont misé 2 millions, ils récupèrent d’abord ces 2 millions. Le million restant est ensuite partagé selon la répartition des actions.

2. Liquidation préférentielle avec participation (« participating preferred »)

Ici, les investisseurs ne se contentent pas de récupérer leur mise : ils participent également à la répartition des fonds restants, en fonction de leur part au capital. Ce mécanisme, parfois qualifié de « double dip », maximise leur retour sur investissement… au détriment des fondateurs.

3. Liquidation préférentielle non-participating 

Dans ce cas, une fois leur investissement initial remboursé, les investisseurs ne prennent plus part au partage des gains restants. Cette formule est généralement jugée plus équitable envers les fondateurs.

4. Multiples (2x, 3x, etc…)

Parfois, les investisseurs négocient un multiple sur leur mise : par exemple, avec un multiple 2x, ils récupèrent deux fois leur investissement avant tout partage. Un mécanisme qui peut lourdement peser sur les fondateurs, sourtout en cas de sortie en dessous des attentes. 

Quelques exemples concrets

Exemple 1 : Liquidation préférentielle simple 1x 

Une startup ayant levé 2 millions d’euros (contre 30% des parts) est vendue 3 millions. Les investisseurs récupèrent d’abord 2 millions. Le million restant est répartie : 300 000 € aux investisseurs (30%), 700 000 € aux fondateurs (70%).

Exemple 2 : Liquidation participating preferred

Avec une clause participating, les investisseurs récupèrent 2 millions, puis 30 % du million restant (soit 300 000 € supplémentaires), pour un total de 2,3 millions. Les fondateurs doivent alors se partager les 700 000 € restants.

Comment négocier pour les fondateurs : le « carve out » 

Pour se prémunir contre un scénario où ils repartiraient presque bredouilles, les fondateurs peuvent négocier un « carve out » : un pourcentage minimal des gains leur est garanti, et cela même si le prix de vente est décevant. 

Typiquement, cela se situe entre 5 et 10% du montant total.

Conseils pratiques pour mieux encadrer la liquidation préférentielle

Mieux comprendre ces mécanismes permet de négocier des accords équilibrés et de protéger au mieux les intérêts de toutes les parties.

1. Méfiez vous des clauses participating : 

Elles peuvent freiner l’arrivée de nouveaux investisseurs qui seraient désavantagés face aux premiers entrants.

2. Privilégiez les clauses non-participating : 

Elles assurent une meilleure répartition et restent attractives à long terme.

3. Limitez les multiples : 

  • Des multiples trop élevés peuvent rendre une sortie quasiment impossible pour les fondateurs. Un multiple de 1x est souvent préférable, voire aucun multiple du tout lors des premières levées. 

Erreurs fréquentes à éviter

Même si la liquidation préférentielle semble être un détail parmi d'autres lors d'une levée de fonds, elle peut avoir des conséquences majeures sur la répartition des gains au moment de la sortie. Voici les principales erreurs que fondateurs et investisseurs doivent absolument éviter.

1. Négliger la lecture détaillée des clauses

Par manque de temps ou d’expérience, certains fondateurs acceptent des clauses standards et cela même sans mesurer pleinement les impacts. Il est essentiel de bien comprendre chaque détail, notamment le type de liquidation préférentielle, la présence ou non d’une participation et aussi des éventuels multiples.

2. Accepter des multiples élevés sans contrepartie

Un multiple 2x ou 3x peut sembler anodin pour sécuriser un investissement. En réalité, il peut largement priver les fondateurs de leur part du produit de la vente, surtout lorsqu’il y a sortie modeste. Limiter les multiples à 1x est souvent plus sain pour la dynamique de l’entreprise. 

3. Sous-estimer l’effet d’une clause participating 

La liquidation préférentielle avec participation (« double dip ») peut drastiquement réduire les gains restants pour les fondateurs. Sans limitation ou négociation de cette participation, les intérêts des fondateurs peuvent être sérieusement affectés rendant difficile la motivation sur le long terme.

4. Oublier l’impact sur les levées futures 

Des conditions de liquidation préférentielle trop favorables aux premiers investisseurs peuvent freiner l’arrivée de nouveaux investisseurs lors des prochains tours de table. Il est aussi très important de trouver un équilibre afin d’assurer la viabilité du financement à long terme.

5. Ne pas prévoir de carve-out en cas de vente modeste 

Dans ce cas de revente à un prix inférieur aux espérances, sans carve-out négocié, les fondateurs peuvent repartir les mains vides. Prévoir un minimum garanti de 5 à 10 % du produit de la vente permet de maintenir leur intérêt jusqu’au bout.

Conclusion

La liquidation préférentielle est une clause stratégique qu’aucun fondateur ni investisseur ne peut se permettre d’ignorer. Bien utilisée, elle sécurise les investissements tout en préservant l’équilibre entre protection des fonds et motivation des fondateurs. Négocier dès le départ des conditions claires et équilibrées est essentiel pour assurer le succès à long terme d’une startup et éviter les tensions lors d’une vente ou d’une liquidation.